Strasbourg, leader des transports durables ?

Notre tribune sur les transports à Strasbourg, dans les Dernières Nouvelles d’Alsace, du 19 septembre 2017.


Strasbourg, leader des transports durables ?

Certes l’Eurométropole de Strasbourg est reconnue en France comme une ville « verte », avec ses pistes cyclables et ses transports en commun, mais son avance dans ce domaine se réduit progressivement face aux autres villes françaises, et surtout elle affiche toujours une qualité de l’air médiocre, il est temps de franchir de nouveaux caps et de s’inscrire enfin comme référence dans la lutte contre ce fléau de santé publique.

Le lancement de la vignette Crit’Air par exemple, même s’il est louable, ne limitera (avec les critères actuels) l’utilisation des voitures les plus polluantes que 1 à 3 jours par an, pas de quoi vraiment encourager les possesseurs de vieux diesels à changer de véhicule. Il faut aller plus loin dans l’interdiction des véhicules polluants notamment Diesel en incluant les poids lourds et bus, tout en aidant et en accompagnant les ménages les plus modestes.

Au centre de Strasbourg, la zone piétonne actuelle (que personne ne remet plus en cause) devra s’agrandir pour englober toute l‘île. Les centres villes sans voiture existent, par exemple en Espagne à Pontevedra où les piétons règnent depuis l’élection d’un médecin à la mairie en 1999… et la preuve que les habitants ont apprécié cette initiative et qu’ils l’on réélut 5 fois ! 

Camions de livraison et les scooters (ultra-polluants) seront remplacés par les alternatives existantes : scooters et utilitaires électriques, livraison à vélos, etc.

Pour la CTS, il reste 88 bus diesel, diesel qui est maintenant remplacé par le GTL (un gaz transformé issu du pétrole, dont l’empreinte écologique reste bien plus importante que le gaz naturel). Ce GTL, bien que moins polluant, émet encore bien trop de particules fines et oxydes d’azote comparativement aux gaz naturels. La solution idéale étant le bus électrique, dont  Strasbourg a pu tester trois modèles différents – on attend les annonces à ce sujet.

Quant aux bus du réseau 67 (CTBR), ils se contentent d’être « aux normes », sans plus d’ambition pour éliminer le diesel…

Batorama s’est également mis au même moment au GTL (qui a l’avantage de fonctionner avec les moteurs diesel existants), en attendant de changer complètement sa flotte avec un projet de renouvellement « écoresponsable » à (trop) long terme (20 ans).

 

Une question de santé

Les études sur la dangerosité du diesel se suivent sans que la réaction ne soit à la hauteur. Il aura fallu le scandale des logiciels de moteurs truqués, qui continue de révéler les malversations des constructeurs, pour faire réagir la société.

Les sonnettes d’alarme sont pourtant nombreuses : rapport du Sénat qui estime à 100 milliards d’€ le coût de la pollution de l’air, plans locaux sur la pollution de l’atmosphère (PPA) jamais appliqués, menaces de sanctions par l’Union européenne pour dépassement des seuils, et ce, malgré des seuils européens supérieurs à ceux de l’OMS.

De plus, les particules ultrafines (ou nanoparticules) qui sont les plus toxiques ne sont toujours pas prises en compte – par manque d’investissement et par laxisme de la communauté européenne qui n’a toujours pas édité de normes pour ces particules ultrafines.

Devons-nous rappeler que les risques liés à l’exposition aux gaz et particules de pollution (celles du diesel étant les pires) sont nombreux ? Problèmes respiratoires et surtout cardio-vasculaires, cancers, risques sur le fœtus, le cerveau, etc.

 

Le diesel

L’interdiction de circulation du diesel par la France d’ici quelques années n’est pas une lubie, c’est une nécessité et un mouvement inéluctable vers lequel s’engagent de nombreux pays et nombreuses villes (Tokyo l’a déjà fait avec succès depuis longtemps).

Pour ne pas en faire une mesure antisociale, il est nécessaire accompagner au cas par cas les ménages les plus modestes.

 

Les alternatives

Avoir une voiture est un luxe qui coûte en moyenne 6.000€/an, et de nombreux habitants l’on bien comprit et choisissent de ne plus en posséder pour un meilleur confort de vie.

Pour une mobilité durable, il ne faut pas simplement changer de carburant, il faut également réduire le nombre de voitures.

Pour cela il faut mener plusieurs axes de développements d’alternatives en parallèle :

  • Les pistes cyclables: l’Eurométropole en est bien fournie, mais il reste de nombreux axes à relier et à sécuriser (route de Colmar à Neudorf/Meinau, rue Boecklin à la Robertsau, route de Bischwiller à Schiltigheim…). Des pistes cyclables séparées des voitures éviteront les accidents graves impliquant des cyclistes et inciteront encore plus de gens à délaisser leur véhicule motorisé.

  • Les transports en commun: l’offre de Strasbourg est très populaire, et le service s’étend (extensions du tram, bus de nuit), mais les nouvelles organisations de travail (externalisation et sous-traitance) imposée par des considérations budgétaires – imposées en partie par la ville – génèrent stress au travail pour les salariés et dégradation de la qualité du service).

 

  • L’autopartage : l’offre de 150 voitures disponibles à Strasbourg s’agrandit chaque année, sachant que chaque voiture partagée permet de remplacer 9 voitures particulières. Citiz essaie de sortir du diesel (ses nouvelles Yea! seront toutes à essence), mais pour aller plus loin il faudra soutenir la coopérative pour passer à l’électrique (les bornes de recharges rapides sont coûteuses).

 

La maturité électrique

Les véhicules électriques (VE) en sont à leur 3e génération, et il n’y plus vraiment d’excuse de ne pas les utiliser. Les modèles qui sortent sont même attrayants et roulent loin avec une seule charge, la Tesla modèle 3, ainsi que les nouvelles versions de Renault Zoé et Nissan Leaf sont très attendues. Ces voitures sont même plus sécuritaires que leurs homologues polluantes, grâce aux nouvelles technologies anticollision et d’aide à la conduite.

Les VE sont moins chères à l’utilisation : un plein coûte 4 à 10€ et permet de rouler entre 250 et 900km suivants les modèles, il y a moins de pièces qui s’usent dans la voiture, même les plaquettes de frein (grâce à un système de récupération d’énergie au freinage qui évite de plus la pollution par le frottement des plaquettes de frein).

La recharge principale se fait soit chez l’utilisateur (dans son garage), soit sur une borne de recharge rapide ou ultrarapide dont le maillage s’étend de jour en jour.

Concernant les critiques sur la provenance de l’énergie et de la pollution engendrée par les batteries, elles sont fondées sur d’anciens critères qui ne prennent pas en compte les améliorations déjà présentes ou à venir dans les filières de production d’énergie (augmentation de la part, du rendement et du stockage des renouvelables, réseaux intelligents, V2G – vehicle-to-grid, etc.) et des batteries (densité d’énergie déjà multipliée par deux en 5 ans, énorme R&D pour de nouvelles batteries, réutilisation d’anciennes batteries de voiture comme stockage d’énergie, etc.)

Sans oublier toutes les autres utilisations de transports électriques légers : vélos, trottinettes, segway, monoroues, etc. Et plus lourds (et moins connus) : scooters, motos, utilitaires, camions, bateaux.

Il faut signaler que malgré la présence d’acteurs importants du véhicule électrique sur la ville de Strasbourg (l’appli Chargemap, le blog Automobile Propre et le blog le guide de la voiture électrique), Strasbourg et l’Eurométropole sont en retard en ce qui concerne les bornes de recharges électriques – peut-être y aurait-il un coup de fouet à donner dans ce domaine pour aider les futurs utilisateurs et les visiteurs à utiliser ces véhicules non polluants ?

Qu’en est-il des voitures à hydrogène, à pile à combustible ou au gaz ? Ces véhicules n’auront à notre avis que peu d’avenir, car elles avaient jusqu’à présent l’avantage de l’autonomie et de la vitesse de chargement, mais l’inconvénient d’avoir très peu de sites compatibles et de ne pouvoir être chargées chez soi ou en ville.