En 2024, pour nous Médecins, la pollution de l’air à Strasbourg reste toujours un problème de santé majeur.
L’ampleur de la pollution aux particules fines :
En 2023, la pollution par les particules très fines (PM2.5) mesurée sur l’agglomération strasbourgeoise se situe toujours à des niveaux en moyenne 2 à 3 fois supérieures aux normes de l’OMS fixées à 5 μg/m³. Le chauffage au bois représente sur l’Eurométropole plus de 70% des émissions de particules fines, et même si les poêles à bois et granulés récents polluent bien moins qu’une cheminée ouverte, la question du chauffage au bois, dans les villes n’est toujours pas assez prise en compte en regard de son impact sanitaire. Les particules et gaz issus de la combustion du bois sont composés de métaux lourds et d’hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), cancérigènes et perturbateurs endocriniens ! Dans la région Rhône-Alpes les cheminées datant d’avant 2002 sont d’ores et déjà interdites, nous demandons que Strasbourg et sa préfecture leur emboitent le pas et suivent même l’exemple du maire de Londres qui a décidé d’interdire tout chauffage au bois y compris récent dans les logements neufs, en raison de l’ampleur de ce fléau sanitaire.
Une timide amélioration dans les concentrations en NO2 :
Pour la première fois dans l’Eurométropole, les concentrations en NO2 –gaz toxique, émis à plus de 96% par les véhicules diesel – respecte les normes européennes. Il s’agit là d’une victoire en trompe-l’oeil, cette amélioration étant majoritairement imputable à une météo favorable à la dispersion des polluants ces deux dernières années. Dans ce contexte, le report à 2026 de l’interdiction de circulation des véhicules Crit’air 3 (dans le cadre de la ZFE) nous interpelle, nous médecins. Pour mémoire : ces normes européennes vont être progressivement calquées sur les recommandations de l’OMS que nous dépassons très largement.
Une pollution industrielle loin d’être négligeable :
Le tour d’horizon de la pollution de l’air à Strasbourg ne serait pas juste et complet si la pollution industrielle n’était pas évoquée. Nous appelons à plus grande vigilance notamment pour que la signature d’accord sur la fourniture de chaleur par certaines industries lourdes du Port du Rhin (réseaux de chaleur) ne se paient pas en contre partie par une moindre vigilance des industriels et des pouvoirs publics sur les émissions de polluants, à titre d’exemple, l’incinérateur de Strasbourg – principal fournisseur de ces réseaux de chaleur – est régulièrement épinglé pour ses dépassements d’émissions de polluants dans l’atmosphère (dioxines, mercure entre autres).
Des co-bénéfices attendus dans le domaine de la santé :
Avec la poursuite du développement du réseau de tramway notamment vers le Nord (Strasbourg, Schiltigheim et Bischheim) qui tarde à être mis sur rails alors que des arguments de santé, forts, documentés, s’imposent avec également des co-bénéfices évidents :
- La réduction de l’usage de la voiture et par effet induit, le développement de solutions alternatives comme le tramway et les pistes cyclables sécurisées, mais également de la marche, permettra des bénéfices en termes de santé, tant au plan de la santé physique que psychologique.
- La baisse attendue des nuisances sonores jusqu’à -30 décibels dans les points les plus exposés actuellement : l’impact des nuisances sonores est bien connu, favorisant le stress et perturbant la qualité du sommeil, à l’origine de problèmes cardiovasculaires mais aussi d’une dégradation de la santé mentale.
- La végétalisation des espaces urbains denses concernés par ce projet offrira des ilots de fraicheur dont le rôle pour atténuer les effets des canicules est essentiel. Bénéficier près de chez soi d’espaces verts est également associé dans la littérature médicale à une réduction des pathologies cardiorespiratoires, à des effets bénéfiques sur le déroulement de la grossesse et des premières années de vie et réduit le risque d’isolement social dont le rôle dans la dégradation de la santé des personnes âgées est désormais bien documenté.
Nous sommes néanmoins lucides sur le report notoire de circulation vers des axes déjà chargés, avec nombre d’établissements scolaires, et de la pollution atmosphérique et sonore qui en découlera, reports qui devraient être anticipés, puis solutionnés en développant toutes les alternatives possibles quitte à réduire également la circulation sur ces axes de dérivation.
Notre engagement et préoccupation première de soignant et de citoyen reste la promotion d’une meilleure santé pour toutes et tous.
Premiers médecins signataires :
- Dr Christian Michel, médecin généraliste
- Dr Thomas Bourdrel, médecin radiologue
- Dr Christophe Marcot, Pneumologue, praticien Hospitalier
- Dr Armelle SCHULLER, médecin Pneumologue-Allergologue
- Dr Yannick Schmitt, Maitre de Conférence associée en médecine générale
- Dr Sophie Rabourdin, médecin généraliste
- Dr Daniel Wiedemann, médecin généraliste
- Dr Clarisse Audouin, médecin généraliste
- Dr Gaspard Prevot, médecin généraliste
- Dr Jean-Marie MONSCH, hépatogastroentérologue
- Dr Fabien ROUGERIE, Professeur associé de médecine générale
- Dr Julien Frey, Service de soins de suite et de réadaptation en Soins Palliatifs
- Dr Emmanuel DAUTHEVILLE, médecin cardiologue
- Dr Thierry Reeb, médecin cardiologue
- Dr Joel Lacroute, hépatogastroentérologue
- Dr Myriam Ernst, médecin généraliste
- Dr Jean-Lionel Bagot, médecin généraliste
- Dr Georges Barth, médecin généraliste
- Dr Sophie Boivin, médecin retraité
- Dr Pascal LECOMTE, chirurgien hospitalier